CERNER LES TENDANCES, LES POSSIBILITÉS ET LES BESOINS DANS LE MONDE
Les femmes et les filles commencent à prendre plus de place en faisant entendre leur voix et leurs points de vue afin de ne plus être forcées de battre en retrait et d’être considérées moins que ce qu’elles sont vraiment.
– Un(e) répondant(e) de la Tournée de consultations
Dans le cadre de la Tournée de consultations, Women Deliver a posé des questions sur les tendances mondiales concernant les filles et les femmes, sur les possibilités de changement, et sur ce qui est nécessaire pour accomplir des progrès. Parmi les nombreuses tendances cernées grâce à la Tournée de consultations, voici les suivantes:
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Les inégalités envahissantes ralentissent les progrès. Des inégalités persistantes liées au sexe, à la situation géographique et au manque d’accès à l’information et à la technologie ralentissent les progrès. Des normes préjudiciables liées au sexe favorisent la perpétuation de pratiques néfastes, comme le mariage d’enfants, la mutilation génitale et d’autres formes de violence imposées aux filles et aux femmes.
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La santé et les droits sexuels et reproductifs sont en péril. Le climat politique mondial est précaire, et ceci a de plus en plus un effet troublant et inquiétant sur les droits des filles et des femmes. Bien que certains gains aient été enregistrés, la santé et les droits sexuels et reproductifs, y compris le droit à un avortement sans risques, sont menacés dans bien des régions du globe.
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Le défi de parler de l’égalité entre les sexes en toute sécurité. Dans certaines parties du monde, le financement de la santé et des droits des filles et des femmes est en déclin, et l’espace politique laissé aux OSC, en particulier les groupes de défense des droits des femmes, est de plus en plus restreint, puisque les femmes qui s’expriment publiquement font l’objet de moqueries et, dans les pires cas, sont tuées. De tels changements aboutissent à des programmes moins efficaces et moins nombreux pour les filles et les femmes ou au bâillonnement des groupes de femmes. C’est un grand pas en arrière sans contrepartie pour l’égalité entre les sexes.
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Une vague d’activisme.Malgré les tendances négatives qui prévalent, le monde est aussi le témoin d’une montée de mouvements importants pour les droits des femmes, les droits des jeunes et l’égalité entre les sexes. Les mouvements dirigés par les femmes et les jeunes, comme les marches pour les femmes du monde, les mouvements #MeToo, Ni Una Menos et #BringBackOurGirls, conjugués à un sentiment d’urgence croissant, contribuent à une hausse de confiance chez ceux qui œuvrent pour les droits des filles et des femmes. Tandis que ces mouvements exigent de ceux qui ont le pouvoir de rendre compte de leurs actions, la peur des conséquences et des représailles continue de museler trop de personnes souhaitant s’exprimer, et l’envergure de ces mouvements n’est pas visible à sa pleine mesure dans l’ensemble du monde.
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Les hommes et les garçons sont essentiels pour parvenir à l’égalité entre les sexes. Tandis que les mouvements menés par des femmes gagnent du terrain, on reconnaît déjà et de plus en plus l’importance des hommes et des garçons dans l’avancement de l’égalité entre les sexes, dans l’évolution des normes liées aux genres et dans la lutte contre l’extrémisme. L’égalité entre les sexes n’est pas un « problème de femmes » mais bien un problème de société, et chacun doit faire sa part pour établir un monde plus égal.
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Travailler de concert dans plusieurs secteurs pour accélérer les progrès. Des exemples frappants ont montré la validité d’un modèle de travail centré sur l’intégration par rapport à une approche plus traditionnelle des problèmes et secteurs. On constate un changement de mentalité car on reconnaîtde plus en plus l’importance de collaborer avec des partenaires nouveaux et inusités pour favoriser les progrès parmi les filles et les femmes – l’accomplissement de grands efforts de développement. Cette collaboration doit englober les gouvernements, le secteur privé, la société civile et les jeunes, tous travaillant de concert.
Nous devons cesser de nous concentrer sur les petites victoires et aller jusqu’au bout de nos efforts pour joindre les plus vulnérables. Nous avons besoin d’équité. »
– Un(e) répondant(e) de la Tournée de consultations
QUE DOIT FAIRE LE MONDE POUR CRÉER UN MILIEU FAVORISANT L’ÉPANOUISSEMENT DES FILLES ET DES FEMMES?
En se penchant sur la situation actuelle des filles et des femmes dans le monde, les participants à la Tournée de consultations ont cerné de nombreux besoins et une multitude de stratégies à mettre en place pour faire progresser davantage l’égalité entre les sexes:
- L’élimination des normes sociales et sexuelles qui existent dans les structures de pouvoir actuelles, tant au gouvernement que dans les familles ou les institutions religieuses, qui entravent l’épanouissement des filles et des femmes. Les participants à la Tournée de consultations ont cerné un changement de cap dans les normes sociales et sexuelles comme une solution possible aux inégalités de pouvoir enracinées, et ils ont particulièrement souligné l’importance de collaborer avec les « protecteurs et gardiens ». Par exemple, les défenseurs des droits des femmes devraient collaborer avec les hommes et les dirigeants communautaires afin de changer les normes sexuelles négatives et montrer l’importance de certaines questions comme la planification familiale et la contraception pour le bien-être des familles. Ces défenseurs devraient également collaborer avec les groupes religieux pour reformuler les concepts religieux qui nuisent aux filles et aux femmes et qui les empêchent d’exercer leurs droits humains, ainsi qu’avec les décideurs politiques masculins, afin qu’ils accordent une priorité à la santé et à l’éducation des filles et des femmes, de même qu’à leur rôle dans la prise de décision et le perfectionnement professionnel.
- Faire des investissements qui profitent aux filles et aux femmes. Les participants à la Tournée de consultations ont insisté sur l’importance de consacrer plus de fonds aux programmes et aux politiques qui ont un impact sur les filles et les femmes. Ils ont précisé que lorsque le monde investit dans les filles et les femmes, un effet d’entraînement se produit, pour le bénéfice de toutes les sociétés. Ils ont aussi noté qu’il est impératif de voir les filles et les femmes dans leur entièreté, et pas seulement du point de vue de leur santé et de leurs droits sexuels et reproductifs. Le monde devrait ainsi étudier de meilleures façons d’investir dans des domaines qui touchent les filles et les femmes, par exemple des programmes qui garantissent une bonne préparation à l’emploi; une éducation et des services à l’enfant sécuritaires, abordables et de qualité et l’accès à des services financiers comme des comptes de banque, du crédit et de l’assurance.
- Accroître le nombre de femmes occupant des postes décisionnels, à tous les niveaux et dans tous les secteurs. Si les femmes ne sont pas à la table lorsque des décisions qui affectent leur vie sont débattues et prises, leurs besoins ne seront jamais adéquatement pris en compte, ce qui freine la société dans son ensemble. Les répondants à la Tournée de consultations ont souligné l’importance des femmes dans les postes décisionnels, en particulier ceux qui influent sur les politiques et les budgets, au niveau municipal, dans l’administration nationale ou dans les parlements, dans les ONG communautaires, les organismes des Nations Unies ou le secteur privé. Si l’on pense en particulier au leadership politique et aux organisations locales qui forment et préparent les femmes à la vie politique, il est nécessaire d’accroître le nombre et la diversité des modèles de référence et d’offrir davantage de soutien aux candidates au sein de leur propre parti politique lorsqu’elles ont besoin d’un meilleur soutien financier.
- Susciter un leadership politique audacieux. Les participants ont souligné l’urgence de mieux soutenir, sur le plan politique, les dirigeants qui comprennent les nombreuses raisons qui valident l’égalité entre les sexes, c’est-à-dire les coûts sociaux et moraux d’entraver le travail des femmes, les coûts socio-économiques de la violence imposée aux filles et aux femmes, les faits qui expliquent pourquoi la santé est le fondement même d’une économie et d’un modèle commercial robustes, et les raisons pour lesquelles l’intégration de l’égalité entre les sexes au sein du gouvernement et du secteur privé est essentielle pour atteindre l’égalité entre les sexes. Les intervenants doivent aussi réclamer une prise de responsabilité de la part des représentants élus envers ceux qui les ont mis au pouvoir, et veiller à ce que ceux-ci investissent dans les femmes et les jeunes, et leur réservent une place dans leurs budgets. Pour des progrès durables, nous devons exiger un financement national de l’égalité entre les sexes, surtout en ce qui concerne la santé et les droits sexuels et reproductifs, plutôt que de dépendre de dons imprévisibles.
- Mieux mettre en application les lois et les droits en vigueur qui soutiennent l’égalité entre les sexes. Les répondants ont fait remarquer que dans bien des cas, on constate des lacunes dans la mise en œuvre des lois et politiques déjà en place. Les filles, les femmes et les jeunes gens doivent donc être mis au courant des lois qui les touchent et être encouragés à agir de façon audacieuse pour se protéger. Grâce à un enseignement et à une formation sur la défense des droits, les filles, les femmes et les jeunes gens peuvent apprendre à comprendre les lois en vigueur afin de défendre et de revendiquer leurs droits. Les garçons et les hommes devraient aussi être sensibilisés aux éléments qui ne sont ni légaux, ni corrects et ni acceptables afin de modifier leur comportement et les paradigmes sociaux.
- Recueillir plus d’information pour corriger les lacunes dont sont victimes les filles et les femmes. Les participants à la Tournée de consultations ont noté que la compilation de meilleures données sexospécifiques et réparties par âge est essentielle pour améliorer les politiques et la planification. Ils ont suggéré des besoins spécifiques. Les besoins énoncés étaient notamment des données sur la mesure des normes sexuelles, des recherches sur l’importance des changements locaux, des données sur l’influence des femmes dans les postes décisionnels, que cela se produise selon une évolution naturelle ou dans le cadre de systèmes provisoires de contingentement, et des données sur les adolescentes, surtout en ce qui concerne les mariages précoces et forcés, les grossesses imprévues, les taux d’infections transmissibles sexuellement, notamment le VIH, et l’accès à un enseignement et à des services de santé sexuelle et reproductive qui sont bien adaptés aux jeunes, y compris l’incidence des actes de violence dont ils sont victimes.
- Profiter du climat actuel par rapport à l’activisme, notamment les mobilisations publiques de masse pour mettre fin à la violence et à l’oppression. Étant donné que le sexisme et la misogynie sont de nos jours sur la sellette, le moment est propice pour remodeler les structures actuelles du pouvoir. Les participants ont pressé les intervenants pour l’égalité entre les sexes de profiter de la façon dont quotidiennement des gens se regroupent et s’organisent. Certains participants ont souligné la nécessité de s’unir en regroupant les nombreux mouvements de femmes qui se retrouvent dans toutes les cultures et les régions géographiques en ayant une cause commune.
- Rapprocher davantage les gens, porter une attention particulière aux groupes marginalisés. En vue d’améliorer la vie de toutes les filles et de toutes les femmes, les répondants ont souligné le besoin d’inclure les segments de population les plus vulnérables et les plus difficiles à joindre. Par exemple, les intervenants doivent aborder les besoins uniques des segments suivants : les filles et les femmes faisant face à des crises humanitaires et à des crises prolongées; les filles et les femmes handicapées; les membres de la communauté LGBTQ+; les filles et les femmes des communautés autochtones; celles vivant en milieu rural; celles travaillant dans l’industrie du sexe; les filles et les femmes victimes de trafic et travaillant sans avoir accès à des droits ou à un travail acceptable; les filles et les femmes vivant au sein de groupes persécutés; celles vivant dans l’extrême pauvreté. En reconnaissant l’existence des filles et des femmes qui sont le plus laissées pour compte, les politiques et les programmes pourront mieux répondre à leurs besoins.
- Exploiter le pouvoir individuel et collectif des jeunes. Dans le monde, bien des jeunes se sont affranchis des attentes traditionnelles dictées par les normes sexuelles et demandent des comptes à ceux qui détiennent le pouvoir. Les participants à la Tournée de consultations ont fait remarquer que les défenseurs des femmes doivent promouvoir le leadership des jeunes femmes, protéger les femmes activistes et soutenir les organisations de soutien aux filles.
- Collaborer avec le secteur privé pour définir son rôle dans la promotion de l’égalité entre les sexes et intensifier les pratiques exemplaires. Parmi les stratégies, on compte notamment l’amélioration des pratiques d’embauche afin de réduire le sexisme conscient et inconscient, la promotion du soutien d’entreprises dirigées par des femmes dans la chaîne d’approvisionnement, le déploiement de plus d’efforts pour que plus de femmes siègent aux conseils et deviennent cadres supérieurs, l’ajustement des politiques en milieu de travail pour mettre en place des congés parentaux plus axés sur l’égalité entre les sexes, l’élaboration de directives et règlements qui correspondent à un salaire égal pour un travail de valeur égale et la modification des méthodes de marketing pour remettre en question les normes sexuelles plutôt que de perpétuer des normes archaïques.